L'évolution des vestes aviateur : des combinaisons militaires aux blousons iconiques
Contexte historique : l'origine du blouson de pilote
Durant l'entre-deux-guerres, la conception de vêtements d'aviation résistants au froid est devenue une priorité absolue pour les ingénieurs militaires. Le besoin était simple : protéger les pilotes de l'USAAF face aux températures extrêmes à haute altitude. Inspirés des vêtements arctiques et des tenues de motards, les premiers modèles jetèrent les bases de la veste aviateur moderne.
En 1934, les aviateurs de l'US Army Air Corps commencent à porter leur premier ensemble d'hiver en peau laineée. Celui-ci possédait une veste modèle B-3 avec le col relevé, un pantalon A-3 assorti, probablement un casque de type BS, des bottes A-5, et des gants A-9. Ce vêtement était divisé en deux parties pour faciliter l'ajustement aux différentes morphologies et offrir plus de liberté de mouvement.
En 1941, un modèle de pantalon d’hiver en shearling, de type A-6, a été conçu dans le style des "culottes de golf" (plus-four knickers) dans le cadre du développement de la tenue dite "Alaskan Suit". L'exemplaire montré ici présente une finition brute, sans traitement imperméabilisant.
(Photo d’archives : SI A4864J)
Un aviateur affecté à un B-17 est ici équipé d'un ensemble complet pour vol hivernal : casque AN-H-16, veste AN-J-4, pantalon AN-T-35, gants A-9 et chaussures A-6A.
La naissance des premières combinaisons en peau lainée
L'utilisation de fourrures et de chauffages électriques
Entre 1917 et 1918, des modèles en une pièce furent développés, combinant cuir robuste, laine épaisse et parfois même des systèmes de chauffage intégrés. Ces efforts visent à améliorer le confort thermique des pilotes en vol, bien que les solutions chauffées restent peu fiables.
Le recours à la fourrure importée
En raison d'une pénurie de fourrures de qualité aux États-Unis, l'armée se tourne vers des importations de Chine, notamment des peaux de chien de Nuchwang. Ces matériaux furent utilisés dans les premières vestes B-1 , surnommées "Monkey Suits", jusqu'à leur retrait en 1931 pour des raisons d'hygiène et d'odeur.
Années 1920-1930 : l'innovation continue
La peau de mouton comme alternative durable
Dès 1923, la peau laineée devient une solution privilégiée. Initialement utilisée comme doublure, elle fut ensuite adoptée pour l'ensemble du vêtement. Des tenues hybrides, comme l'association veste B-1 et pantalon A-1, virent le jour.
Le modèle B-2 : entre cuir et fourrure exotique
Un autre modèle marquant fut le blouson B-2 , recouvert de cuir ou de tissu Bedford, et doublé de fourrure de ragondin sud-américain. Produit de 1926 à 1944, il fut décliné avec différentes doublures, notamment en couverture.
L'arrivée du cuir de veau et du velours tricoté
Pour réduire les coûts, l'armée testa le cuir de veau et des tissus comme le velours tricoté. En 1928, la combinaison B-7 devient un standard. Malgré leur légèreté, ces modèles manquaient de performances thermiques.
1934 : le tournant shearling et l'avènement de la B-3
Le débat entre peau de renne et mouton
En 1934, un débat opposa les partisans de la peau de renne d'Alaska et les défenseurs de la peau de mouton. Cette dernière fut finalement adoptée pour ses qualités thermiques et sa meilleure disponibilité.
La veste B-3 : une légende est née
Testée à Wright Field, la veste aviateur B-3 se distingue par sa conception bi-matière : cuir traité à l'acide à l'extérieur, laine épaisse à l'intérieur. Le pantalon A-3 l'accompagne pour former une tenue emblématique de l' USAAF .
Sur une photo datant d'environ 1942, on peut voir des membres d'équipage d'un avion de transport Curtiss C-46. Celui à gauche porte une veste en mouton retourné modèle B-6, accompagné d'une écharpe blanche en soie. Les deux autres hommes, au centre et à droite, sont vêtus de vestes B-3. L'homme à droite est équipé d'un microphone laryngophone T-30 et d'un casque audio HS-33, comprenant des écouteurs ANB-H-1. Tous semblent porter une coiffe de vol modèle B-1.
(Photo d'archives : SI 77-5816)
À bord d'un bombardier B-17, un aviateur porte un ensemble en peau lainée qui, bien qu'efficace contre le froid extrême, était connu pour être encombrant, rigide et lourd. On le voit utiliser une bouteille d'oxygène portable, surnommée « bouteille de promenade », indispensable pour se déplacer en altitude. Combinée au masque A-10, cette bouteille offre entre quatre et huit minutes d'oxygène selon l'effort fourni et l'altitude. Il est également équipé de gants A-9 et de lunettes B-7.
(Photo d'archives : SI 80-20357
Modernisation technique des blousons de pilote
Traitement du cuir : la solution Korsseal
Afin d'imperméabiliser les peaux, un procédé à base de colorant polyacrylate fut introduit dans les années 1930. Cela permet de rendre les blousons de pilote plus résistants à l'eau, à l'huile et à l'essence.
Nouvelles versions allégées pour les années 40
En 1939, le modèle B-6 voit le jour : plus léger, plus souple, et conçu pour les cockpits fermés. D'autres variantes furent testées (B-5, A-4) avec des mélanges laine-tricot et des coupes ergonomiques.
Limites des modèles shearling et alternatives envisagées
Trop important pour les pilotes actifs
Des tests en chambre froide en 1940 révèlent que les vêtements en peau lainée nuisent à la mobilité. Résultat : appel à des modèles chauffants et multicouches plus pratiques.
Explosion de la demande après Pearl Harbor
En 1941, les besoins de l'armée en peau de mouton explosent : 118 millions de pieds carrés sont nécessaires entre 1942 et 1944. Les contraintes logistiques forcent à repenser les stocks et la production.
Transition vers le tissu : la fin annoncée du tout-cuir
En 1942, le général Arnold rejette publiquement les blousons en cuir, appelant à des matériaux plus modernes. Les Britanniques suivent, abandonnant cuir et shearling au profit de techniques textiles.
L'Alaskan Suit et les tests en milieux extrêmes
La combinaison "Alaskan Suit" composée de la veste B-7 et du pantalon A-6 est testée en conditions polaires. Bien qu'efficace contre le froid, elle est jugée trop rigide. On recommande les canapés superposés en laine ou en alpaga avec coupe-vent.
Conclusion : la veste aviateur, une icône toujours d'actualité
Aujourd'hui encore, le blouson de pilote USAAF reste un symbole de robustesse et d'élégance militaire. Chaque modèle vintage ou inspiré de l'époque raconte une histoire unique. Pour les passionnés d'aviation, de mode ou de patrimoine, la veste de guerre reste une pièce maîtresse à posséder.